Alcool: est-il devenu socialement inacceptable de boire?

par adm
Et si boire de l’alcool n’était plus bien vu?

Introduction à la problématique

L’abstinence d’alcool, souvent interprétée comme un manque de sociabilité en Suisse, soulève des questions importantes malgré les dangers avérés de l’alcool pour la santé, même en consommation modérée.

Quel est le sujet?

En Suisse, l’apéritif est une tradition culturelle solidement établie. Les individus qui choisissent un jus de fruit plutôt qu’un verre de vin blanc sont parfois jugés négativement. Or, il est largement reconnu que l’alcool a des effets délétères sur la santé. Faudrait-il alors repenser sa normalisation sociale ?

Des questions telles que «Es-tu malade? Enceinte? Sous médication?» sont fréquemment posées à ceux qui optent pour un soda plutôt qu’un verre de vin lors des moments festifs. En Suisse, la consommation d’alcool est généralement perçue de manière positive socialement, plaçant souvent ceux qui s’abstiennent, que ce soit de manière ponctuelle ou régulière, dans une position où ils doivent justifier leur manque de sociabilité. Exagérant un peu, celui qui ne boit pas est perçu comme un rabat-joie. Malgré cela, et au grand dam des amateurs de vin et de cocktails, l’alcool est nocif pour la santé. «C’est une substance psychotrope dangereuse qui est responsable de près de 1600 décès par an en Suisse. Chez les jeunes adultes, c’est la première cause de mortalité, que ce soit en lien avec des accidents dus à une consommation excessive, des comportements violents en état d’ébriété ou des suicides sous influence de l’alcool», explique Dr Thierry Favrod-Coune, responsable de l’Unité des dépendances aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG).

Alcool et tabac, une comparaison valide?

Malgré sa dangerosité et sa légalité, pourrait-on envisager que l’alcool devienne socialement moins acceptable, à l’image du tabac qui, autrefois omniprésent dans les publicités et les espaces publics, est aujourd’hui largement réglementé? Grâce notamment à son interdiction dans les espaces publics clos, fumer n’est plus perçu comme un acte anodin. «L’exemple du tabac illustre qu’il est possible de changer les perceptions sociales d’une substance autrefois à la mode à un produit reconnu comme nuisible», continue le spécialiste. Bien que l’alcool ne cause pas de nuisances directes telles que la fumée passive pour ceux qui ne consomment pas, Dr Favrod-Coune insiste sur le fait que l’alcool a également des répercussions sur les autres. Entre les coûts de santé élevés, les accidents, les comportements agressifs et les incivilités liées à son usage, il est crucial de repenser la normalisation de sa consommation.

Normaliser l’abstinence

Nicole Egli Anthonioz, responsable de projet chez Addiction Suisse, ajoute : «Il est bénéfique de dénormaliser la consommation d’alcool, mais il est aussi essentiel de normaliser l’abstinence. Certaines mesures structurelles comme l’imposition de restrictions dans les cantines d’entreprises, la limitation des heures de vente d’alcool et l’augmentation de l’âge légal pour l’achat d’alcool peuvent y contribuer. Par exemple, les alcopops, des boissons sucrées alcoolisées, ne sont vendus qu’aux personnes de plus de 18 ans et non à celles de plus de 16 ans. Cette distinction est significative car commencer à consommer de l’alcool plus tôt dans la vie augmente le risque de développer ultérieurement des habitudes de consommation problématiques.»

Une consommation moins fréquente, mais plus excessive

Si la consommation quotidienne d’alcool a diminué – en 1992, 30% des hommes buvaient tous les jours, contre seulement 15% en 2017 –, cette bonne nouvelle est tempérée par une hausse de la consommation à risque entre 2007 et 2017, passant de 13,8% à 17,7% de la population. Ce changement s’opère malgré un discours renouvelé des professionnels de la santé. «Aujourd’hui, le message est clair : il n’y a aucun bénéfice à consommer de l’alcool, même en petite quantité. Les effets potentiellement bénéfiques des tanins présents dans le vin ne peuvent être dissociés des effets toxiques sur l’ensemble du corps. La consommation d’alcool est associée à plus de deux cents maladies. C’est une drogue, au même titre que les autres. Bien que son interdiction complète puisse engendrer un marché noir dangereux, il est impératif de limiter son accessibilité et de cesser de le promouvoir», conclut Dr Favrod-Coune.

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* À noter, par exemple, qu’une bière de 2,5 dl, 1 dl de vin ou encore 0,25 dl de whisky représentent chacun une unité d’alcool.

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